L’égalité de salaires entre les femmes et les hommes… Ce n’est pas encore pour cette année !
A l’occasion de la Journée Internationale des Droits des Femmes, plusieurs études nous confirment que les écarts de salaire sont toujours présents en France et en Europe.
Tous les chiffres sont sur la même tendance. Les inégalités salariales perdurent et ont de la peine à se résorber.
13% d’écart de salaire en 2019 chez les cadres
L’APEC [1] a publié le 5 mars dernier une étude[2] révélant qu’en 2019, la rémunération médiane des hommes cadres était 13% plus importante que celles des femmes cadres (52 K€ contre 46 K€). Cet écart s’explique en partie par le fait que les femmes et les hommes n’occupent pas les mêmes emplois et que les hommes sont surreprésentés dans les fonctions les plus rémunératrices (informatique, production industrielle). Ils ont également plus de responsabilités hiérarchiques.
Une fois ces effets structurels gommés, l’écart dit « inexpliqué » est de 7%. Les inégalités sont donc une réalité, ressenties en tant que tel par une majorité de femmes (63%), la perception étant plus faible chez les hommes (43%). 50% des cadres considèrent d’ailleurs qu’il existe dans leur entreprise des inégalités salariales à compétence et poste équivalent.
Autre confirmation de cette étude : les écarts se creusent en cours de carrière à l’arrivée d’un enfant. C’est la femme qui majoritairement réduit son temps de travail et fait l’impasse sur sa carrière : 14% des femmes cadres de 35 à 54 ans sont à temps partiel contre seulement 3% des hommes[3].
14,1% d’écart de salaire dans l’Union Européenne
Actuellement dans l’Union Européenne, les écarts de salaire sont de 14,1% et de 30% pour les retraites, en défaveur des femmes, tous secteurs confondus, sachant que dans le seul secteur privé l’écart est plus important. En France, cet écart est de 15,8% (en 2018), 1,4% au Luxembourg et 21,8% en Estonie…
La commission européenne veut avancer et prône une plus grande transparence sur le sujet dans les entreprises, allant jusqu’à proposer des amendes à celles qui continuent à maintenir des écarts de rémunération. Concrètement, il s’agirait dans les entreprises de plus de 250 salariés, de permettre aux salarié.e.s de demander des informations sur les salaires en fonction du genre et de la position dans la société.
Cette proposition est à saluer. Mais déjà certains syndicats, comme la confédération des syndicats européens (CES) relèvent que si la proposition contient de bons principes, « elle est affaiblie par des outils inadéquats pour la faire fonctionner dans la pratique[4] »
Et ne nous réjouissons pas trop vite, quand on sait que la procédure d’approbation de cette proposition devant le parlement européen et le Conseil pourrait prendre plusieurs années… et que la proposition sur les quotas de femmes dans les conseils d’administration est bloquée depuis 8 ans par les États membres…
16,8% d’écart de salaire dans le secteur privé en équivalent temps plein (EQTP) en 2017 en France, 28,5% d’écart de rémunération en intégrant les inégalités de volume de travail
(les femmes sont plus souvent à temps partiel et moins souvent en emploi dans l’année que les hommes).[5]
Comme le souligne l’INSEE qui rapporte ces chiffres dans une étude publiée en juin 2020,[6] les écarts de salaire en EQTP sont dus en grande partie à la ségrégation professionnelle : 68% de l’écart provient en effet du fait que les femmes et les hommes n’occupent pas les mêmes postes c’est-à-dire une profession donnée au sein d’un établissement donné. Ainsi, l’écart de salaire moyen en EQTP entre les femmes et les hommes pour un même poste se réduit à 5,3% dans le secteur privé en 2017.
Ces différences de salaire moyen, en EQTP proviennent en premier lieu d’inégalités dans l’accès aux emplois les mieux rémunérés. En 2017, la probabilité pour une femme d’accéder à un emploi parmi les mieux rémunérés est de 36% inférieure à celle des hommes en 2017, pour les 1% d’emplois les mieux rémunérés, les femmes ont une probabilité d’accès inférieure de 58%.
L’index égalité : outil salvateur ou poudre de perlimpinpin ?
Tous ces constats amènent à questionner la pertinence de l’index égalité. Les indicateurs qui le composent reflètent insuffisamment les raisons systémiques des écarts de salaire dans une entreprise. Ce qui doit être interrogé c’est la place des femmes dans l’organisation. Quels métiers exercent-elles ? Quel rang hiérarchique ? Comment sont rémunérées les compétences requises ? Quel temps de travail ?
Car, malgré les obligations qui pèsent sur les entreprises depuis plusieurs décennies en matière d’égalité femmes-hommes, la situation ne bouge pas, ou si peu ! [7] L’index égalité existe depuis 2 ans. C’est trop peu pour en tirer des résultats probants. Des failles ont été identifiées susceptibles de fausser la réalité de la situation et entachent la note d’un certain scepticisme. Le gouvernement planche actuellement sur une révision des indicateurs. Il est prévu de rajouter un nouvel indicateur sur la part des femmes parmi les cadres dirigeants.
Dans une récente note, Terra Nova[8] préconise pour que l’index reflète la situation de l’ensemble des femmes, d’ajouter un indicateur permettant de calculer la part des femmes dans les deux premiers déciles de la distribution salariale de l’entreprise et de le noter sur 15 points afin de tenir compte de l’importance de la ségrégation des métiers.
Le débat n’est donc pas clos et pas près de l’être…
Rendez-vous l’année prochaine, même date, pour les mêmes constats ?
D’ici là, n’attendez pas de creuser les écarts dans votre entreprise. Contactez-moi pour vous mettre en conformité avec les exigences réglementaires !
Parce que l’égalité femme-hommes est la clef pour pérenniser le développement de votre entreprise.
Marie-Hélène Joron
Conseil et formatrice en égalité professionnelle et règlementation sociale
Présidente et fondatrice de Perenni’Team Egalité
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[1] Association Pour l’Emploi des Cadres
[2] Salaires des cadres : quels écarts femmes/hommes ? Source APEC, inégalités femmes-hommes chez les cadres, mars 2021
[3] Source APEC, inégalités femmes-hommes chez les cadres, mars 2021
[4] Esther Lynch, secrétaire générale adjointe du CES.
[5] Etude INSEE parue dans INSEE PREMIERE N°1803 de juin 2020
[6] Etude INSEE op.cit
[7] En Suisse, la dernière enquête sur la structure des salaires met en lumière que l’écart salarial entre les femmes et les hommes a augmenté de près d’un point de pourcentage entre 2014 et 2018 atteignant 19 % et la part non expliquée a même augmenté de 3 points de pourcentage.
[8] Terra Nova – L’index de l’égalité professionnelle : occasion manquée ou outil prometteur ? Kenza Tahir – 21 janvier 2021